mercredi 16 octobre 2013

Les deux pipelettes : Dylan Carlson aux Instants Chavirés


Je n'avais jamais remarqué les deux petits éclairs tatoués sur les pommettes de Dylan Carlson ; son regard vif encadré par deux foudres. Pendant que la salle des Instants Chavirés, se rempli progressivement, Carlson est assis à une table, il discute avec les gens, vend et dédicace ses disques. Dans son carnet Exacompta il note scrupuleusement d'un trait bleu chaque disque vendu. "You want something to drink ? - Yeah sure, a coke please". Sa mince voix nasillarde est accueillante.

Pas tout à fait comme celle des deux pipelettes qui sont assises à coté de moi dans d'anciens fauteuils de cinéma rouge. On en est déjà au deuxième morceau et elles augmentent le volume sonore de leur conversation, alors que le reste de la salle s'hypnotise. Quelques têtes se retournent, des sourcils se froncent, certains tentent le dialogue réprobateur. Au milieu des delay suspendus et des résonances hypnagogiques, leur conversation de café du commerce entre deux bières se prolonge. Parfois une courte pause : une des jeunes filles passe un rouge à lèvre sombre sur les lèvres de sa voisine. Et Dylan Carlson enchaîne ses notes étirées, plus intimistes que celles qu'il joue habituellement pour Earth. Sur la toile du minuscule ampli derrière Carslon un autre petit éclair est gribouillé à la main.

Puis quelques notes ressemblant au riff de Money de Pink Floyd se font entendre, les vibrato et les reverb cathartiques de Carlson répondent au jeu de batterie minimal de Rogier Smal. Chaque sonorité s'entrelace dans la suivante produisant de merveilleuses notes fantômes. Carlson, assis sur sa chaise, balance son buste d'avant en arrière pendant que Smal entretient de longs roulement de batterie. La symbiose est totale, pour nous aussi : les deux pipelettes se sont enfin tues, leurs deux langues emmêlées aux rythmes des longues arches soniques du guitariste aux petits éclairs bleus. Entre les morceaux, on entend maintenant le souffle du petit ampli brun.


Relire notre interview de Dylan Carlson



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