dimanche 15 mai 2011
Le bal négligé : Magnetix à Mains d'Oeuvres
"Parce qu'en 2023, on l'aura dans l'cul ! Il nous restera plus qu'la dope électrique !". Une gouaille bordelaise, les veines du cou gonflées, une gouaille que Gérard de Nerval aurait aimé, comme dans un troquet de banlieue près de Pantin. La fumée est dense au Bal des Chiens.
C'est quoi le rock'n'roll en 2011 ? Je ne sais plus ce que c'est, mais je sais que ça se vit en couple, à la scène comme dans la salle. C'est peut être ça la nouveauté. Parce que Magnetix, ça n'est pas forcément neuf musicalement. Vince Taylor est passé par là, à Paris aussi, trouant ses amplis au couteau papillon, pour créer de la distortion, en 1961, la violence du son. Les White Stripes ont joué en couple : fille batterie, mec guitare. Alors que leur reste t'il aux Magnetix, 14 ans après les White Stripes, 50 ans après Vince Taylor ?
Ils leur restent la brutalité et la complicité des couples unis par le bruit : celui sur scène qui se guette du regard avant de balancer d'un même geste des balafres sonores étourdissantes et ceux qui se montent dessus et s’embrassent dans la salle. Une thérapie aphrodisiaque de groupe ? On se lance des regards, on se colle, on se lèche, on recommande une bière ; la batteuse envoi un jet d'eau adroit sur une fille du premier rang.
Alors, merde, c'est ça le rock'n'roll en 2011 ? Finie l'ambiance de vestiaire entre blousons noirs, de boite de nuit à 5 du mat' avec une fille perdue pour 30 gars en chaleur ? Oui, c'est ça, et c'est Graeme Allwright en version punk (est-ce que j'ai mal entendu ?) et c'est les filles qui slamment et qui embrassent à pleines dents, leurs culottes en tissu clair mouillées de bière sur fond de tremolo-verb. C'est le bal négligé. Un habitué nous dit : "Vous roulez dans le bal, c'est assez rigollot ce soir".*
* Gérard de Nerval, Les Nuits d'octobre. Paris, - Pantin - et Meaux, 1854.
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