dimanche 28 mars 2010
"Wicked gig, man" : Spectrum au Point Ephemère
Ça commence par When tomorrow hits et Suicide. Pas le concert de vendredi mais ma rencontre avec les Spacemen 3. C'était à Dijon un dimanche soir. J'ouvrais ma valise dans mon appartement d'étudiant, je venais juste d'arriver après un week-end passé chez mes parents. Il devait être 23h15, j'ai allumé Radio Dijon Campus et j'avais 19 ans. Je ne sais plus qui animait l'émission mais je sais que suis resté figé sur place ; puis j'ai dû m'assoir sur le rebord de mon lit ou me rapprocher de mes enceintes... Je me rappelle l'éclairage tamisé de ma chambre et le fondu enchainé entre When tomorrow hits et Suicide ; le tambourin de l'intro de Suicide, les notes de synthé et de guitare obsessionnelles.
Ma seconde rencontre avec Sonic Boom, ça s'est passé en 1997, lors du Festival Musiques Ultimes à Nevers. Sonic Boom jouait en duo avec Eddie Prevost de AMM. Les sièges en velours rouge du petit théâtre étaient confortables et je me suis senti un peu déçu au début de ce concert. Ça commence toujours comme ça aussi. Puis je me souviens avoir un peu fermé les yeux. Tout s'organisait, prenait forme... les cables et les ondes du VCS 3 se mélangeait avec les percussions d'Eddie Prevost. J'aurai pu quitter mon corps mais ça ne s'est pas produit. Du moins je ne crois pas.
A la sortie du concert, j'ai croisé Sonic Boom dehors : un grand type livide appuyé sur une colonne de l'entrée du théatre. Puis dix années se sont écoulées : j'ai patiemment accumulé les CD des Spacemen 3, les pictures disques de EAR et j'ai passé beaucoup de temps à chercher des infos sur internet sur les Spacemen 3 ou sur les groupes affiliés. J'ai aussi progressivement quitté leur drone rock et les expériences sonores de Pete Kember. Enfin, c'est ce que j'ai cru. Je n'avais plus vraiment besoin de les réécouter, elles avaient façonnés mes obsessions musicales.
A une date indéfinie, je suis devant les portes de Mains d'Oeuvres et une affichette m'annonce que le concert de Spectrum plays Spacemen 3 est annulé.
En décembre 2005, je suis au Point Éphémère et le début du concert de EAR ne me parait pas très bon. Puis les lumières bleues des projecteurs commencent à onduler et les vagues du VCS 3 deviennent tangibles, brutales. Je me rappelle qu'avant le concert Sonic Boom était appuyé à une des colonnes en béton de la salle.
Puis mon frère m'offre Spacemen 3 & the Birth of Spiritualized, c'est une biographie par Erik Morse. C'était en janvier 2009 et le 14 mars, je suis comme une groupie devant le Nouveau Casino : Sonic Boom va jouer les morceaux des Spacemen 3 et je vais les entendre en live pour la première fois. Au début du concert, il brandit une bouteille de vin blanc et chante un peu faux. Puis When tomorrow hits commence, la salle se tent, captive de la fuzz. Les figures deviennent extatiques.
Vendredi soir dernier, Spectrum jouait au Point Éphémère. Sonic Boom est dans la salle, appuyé contre le mur derrière le stand de disque. Il écoute Django Django, la première partie du concert : un curieux mélange des Monks jouant de la new wave, avec un chanteur aux allures de Beach Boys écossais. Sonic Boom sort quelques temps pour parler tranquillement à l'extérieur de la salle.
Les premiers accords de Fender se font entendre et le concert commence. Comme d'habitude c'est un peu mal calé et il chante faux. How you satisfy me, When tomorrow hits, le set est quasi identique à celui de 2009. Spectrum y ajoute War sucks, une reprise de Red Krayola. Les accords se répètent, la fuzz tournoie dans la salle. Je me retourne et je vois un grand type appuyé contre une colonne, la bouche entrouverte, les yeux fermés. Sur scène, Sonic Boom triture ses filtres, change de guitare, se met face à l'ampli ; le temps n'a plus d'importance, Suicide commence. Je me dirige vers les toilettes et trouve deux filles en train de s'embrasser en attendant que les WC se libèrent, elles entrent en vitesse. Un homme les accompagne. Je prend l'autre WC ; Suicide fait trembler la porte.
Les bottes blanches de Lemmy Kilmister apparaissent le long du comptoir, il tape sur l'épaule de Kember, déjà sorti de scène, comme ses musiciens. Il ne reste que le batteur qui continue à faire résonner le drone de Suicide devant la salle hypnotisée. Le drone vibre encore, sursautant à chaque percussion de batterie. Pete lève les yeux et entend la voix rauque de Lemmy sortant des fumigènes : "Wicked gig, man !".
Voir des photos du concert, écouter Revolution (live 2009 au Nouveau Casino) et aller sur le myspace de Sonic Boom.
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